mercredi 16 mars 2011

What's up ?!

 

"Simon says..."
"Journée très sympa, sur le terrain, avec Simon, le programme coordinator et Jennifer, en charge des programmes santé, de la Croix Rouge Ouganda

Simon est vraiment drôle et comme il parle en anglais avec tout le monde, vu qu'il ne parle pas luo puisqu'il vient du sud du pays, je peux profiter de toutes les plaisanteries qu'il lance et de son ton délicieusement ironique. Il est clairement du genre super cultivé et intelligent... et du genre à citer Marx plus ou moins ironiquement !! J'ai adoré par exemple quand il a lancé un « If you go to see the Bishop, quoting Karl Marx ... » en partant dans un grand rire ravi de gamin qui a joué un bon tour ! Du genre également à entamer un débat sur le droit de vote en me parlant des droits de vote des paysans français juste avant la Révolution puis après la Révolution française. Une grande gueule franche et sympathique.
Il est de ceux qui savent raconter les histoires et capter l'attention. Il nous raconte des anecdotes de son enfance, comme celle où il cherchait l'enfer en creusant le sol durant de longues heures, dans le champ derrière son école, après que son professeur ai dit en classe que sous la terre il y avait l'enfer ! Ou des histoires à propos de son grand-père qui dressait des taureaux avec une méthode bien à lui... en les assommant de manière particulière pour leur imposer une forme de respect... ! 
Tout ça dans le 4x4 secoué dans tous les sens sur les mauvaises pistes que nous empruntons pour nous enfoncer vers le district d'Amuru. Il faut vraiment s'accrocher, d'autant plus qu'il n'y a évidemment pas de ceintures de sécurité à l'arrière, sinon on se prend la vitre du coté ou le siège de devant en moins de temps qu'il ne faut pour le dire... et parce que le chauffeur roule fort vite, on quasi-vole d'ornières en ornières, c'est un style."


 
 

 

mercredi 23 février 2011

Boda-boda ou la liberté à moto



 " Soirée au BJZ Club avec William et ses potes et Marie, qui vient d'arriver ce soir à Gulu. La soirée est drôle et joyeuse. Mais elle a un goût de fin, d'aux revoir et de bière aussi, un petit peu. Moins que la dernière fois puisque cette fois-ci notre équipe n'a pas gagné le quizz-géant donc nous n'avons pas remporté une énorme caisse de bières Nile Gold comme jeudi dernier. Et cette nuit je dois encore être capable de boucler mon sac et ranger les dernières affaires vu que demain matin je pars très tôt.
Je suis rentrée un peu tard. 

Dernière virée enivrante de nuit sur un boda, à travers cette ville très sombre, calme, et mystérieuse à cette heure-là... mais que j'aime fort. Je suis juste bien, c'est si bon de ressentir la ville défiler, cheveux au vent, en ayant totalement confiance et en se laissant conduire comme une vieille habituée. Petite pluie fine et joyeux goût de liberté. Oui, c'est cela, des pépites de liberté qui n'ont pas de prix et un joli concentré de lâcher-prise. Qu'est-ce que c'est bon !!! 
Je voudrais rester des heures à filer un peu trop vite sur ce boda. Anyway, j'ai soudainement envie de faire le tour de l'Afrique comme cela, et en souriant de toutes mes dents aux maisons endormies et aux crapauds invisibles.
J'ai failli rester à la porte de l'hôtel tout de même. Heureusement, après avoir tambouriné régulièrement à la porte de la cour pendant un quart d'heure, le gardien s'est finalement réveillé pour m'ouvrir. J'ai un peu honte d'avoir fait tant de bruit, d'habitude c'est moi qui peste quand je suis réveillée à 1h ou 2h du matin par les coups de damnés donnés au portail métallique.

Ces "aventures" en moto, petites ou un peu plus grandes, vont me manquer. A chaque fois c'était la même joie pure et simple de se sentir libre et vivante."

 

Bon... on s'casse ?!










Tranches de rues de Gulu ! Qui donnent envie de ressortir le sac à dos... ;)

Un ptit coup pour la route ! (Stories of Kitgum)


Pèle-mêle d'extraits.
En route pour le week-end à Kitgum, au nord de Gulu.
" Nous traversons d'anciens camps, des bleds paumés, de la brousse à perte de vue... le tout secoués comme des pruniers et bondissants de nos sièges tous en rythme au gré des plus grosses ornières. Tenir une conversation à peu près cohérente avec ma voisine est alors assez drôle.
En traversant Acholibur -ce nom qui m'avait fait rêver-, je me rends compte que ce n'est rien d'autre qu'un trou perdu, un village bien rustique qui essaye par endroits de ressembler à une petite ville en devenir.
Terre rouge ou parfois très sablonneuse. Roches volcaniques, paysage vert entouré de bleu-gris ou de rouge-marron parsemé d'ocre, de vert tendre et d'éclats rose bonbon des chemises d'écoliers. Le ciel est couvert, menaçant par endroits, mais laisse apercevoir de temps en temps quelques montagnes au loin. Un grand arbre mort au milieu de cette brousse, trônant encore avec une certaine élégance, est escaladé par des mômes intrépides et agiles.
Après Acholibur, Kitgum apparaît sans crier gare et petit à petit ses traits se précisent.

2h30 plus tard (pour 100 km), nous arrivons donc au bus park de Kitgum. Le débarquement est encore plus chaotique, désorganisé (bordélique même), qu'au départ. Tous ceux qui attendaient le bus pour rentrer à Gulu se précipitent dessus dès son arrivée. La foule veut monter en même temps et même avant que l'on ne soit descendu. Tout cela est très logique !
Désorganisation la plus totale. Une femme portant son bébé dans le dos essaye de descendre, elle se presse entre trois personnes qui montent et semblent faire la course pour arriver par tous les moyens possibles au fond du bus les premiers. Son bébé est écrasé, sa tête est souvent heurtée ou tournée à son insu et la petite ne peut rien faire à part pleurer de peur dans cet univers barbare.
Je suis également poussée et écrasée dans l'allée étroite encombrée de volumineux ballots. Ceux qui veulent monter font même passer par les fenêtres leurs bagages pour tenter de se réserver des places. Tandis que d'autres font passer leurs enfants par les fenêtres pour les faire descendre, en espérant qu'une âme charitable dans la foule impatiente se dévoue pour les attraper. C'est n'importe quoi, les gens ne respectent plus grand chose et ont perdu tout sens civique ! La femme qui me précède dans l'escalier est tellement bousculée que sa valise finit par s'ouvrir et laisser une bonne partie de son contenu se déverser à la sortie.
Quand je me suis enfin extirpée du véhicule, poussée par derrière pour faire de la place, je me retourne vers le bus. Et éclate de rire. Sur la fenêtre, juste au dessus de la porte du bus, ce message génial est tagué « RELAX, Jesus is in control » !!! C'est tellement énorme tant c'est approprié à la situation et en même temps tant ça paraît ironique voire absurde !! Ils sont géniaux !!

J'appelle Marion, la sœur de Eunice, afin qu'elle me dise où elle habite avant de prendre un boda pour m'y rendre. En traversant le bus park, la première pensée qui me vient est « Bon sang, cette ville à l'air glauque et loin de tout ! ». Le chauffeur est sympa et parle un peu anglais, à un moment il m'indique un carrefour en me disant « If we continue this road, we will arrive in Sudan ! » et je réponds en souriant « Ok, but I'm not ready for Sudan, I would rather stay here please ! ». Haha. "

" En soirée je discute politique avec les frères de Pamela, c'est super intéressant ... et parfois assez hallucinant !

Pamela me donne un seau d'eau et une petite bougie pour aller me laver dans le cagibi qui jouxte les 2 latrines, dans un coin du jardin. Je me douche donc à la lampe frontale (pour économiser la bougie), ça sent les latrines et surtout ... ça grouille d'énormes cafards. Mama mia, quelle douce et charmante surprise ! Moi qui fait la fière d'habitude de ne jamais avoir peur des petites bêtes et autres araignées, là, je n'en mène vraiment pas large. Ils sont nombreux, tout autour de moi, sur les murs, et font largement la taille de la paume de ma main en longueur, sans exagérer. Regardez sur votre main et imaginez-les ... c'est gros. Les quelques araignées sont de la même taille mais sont moins répugnantes que ces carapaces luisantes aux déplacements rapides et imprévisibles. Les fourbes.
La douche glacée va donc se révéler extrêmement succincte et étonnamment rapide, pour vite sortir de là ! "

 " Vers 15h, nous déjeunons dans un boui-boui du centre ville après avoir escaladé toutes les collines et parcouru les environs de la ville en long et en large comme des Tom Sawyer assoiffés de liberté, de grands espaces et de rires complices. Akena et Marion sont vraiment cool. Nous prenons le chemin du retour, épuisés, tandis que je cuis au soleil. On n'est pas loin des 50° en plein soleil. 
Marion et moi marchons à droite de la route, alors que nous devrions être à gauche, en traversant un pont par la voie piétonne. Une fille en sens inverse nous le fait remarquer : « You're in the wrong way ». Alors Marion dégaine cette réponse géniale et impertinente du tac-au-tac « Don't care, we are in Sudan ! » (au Soudan le sens de circulation est inversé). Fou rire garanti ! Qu'est-ce qu'elle me fait rire !
De retour à la maison, Margaret me demande par l'intermédiaire de Marion si j'ai bu. Haha. Nan, j'ai simplement pris de bons coups de soleil ! Et vu comme ma peau me brûle, j'imagine assez facilement combien mon visage est rouge.

J'ai d'ailleurs essayé d'expliquer cela à la petite-grande Pamela. D'où son adorable question, l'air intrigué et penseur : « mais... il n'y a pas de soleil dans ton pays ? ». "

Ce soir, 2ème round dans le cagibi-aux-cafards... et je suis bien obligée d'aller me laver, j'ai beaucoup transpiré aujourd'hui, ma peau est toute salée et poisseuse (Amis du glamour, bienvenu !) ! Ils sont encore plus nombreux ce soir, ils le font exprès ? J'entre après avoir viré deux gros crapauds paresseux et rassemblé mon courage. Ne surtout pas perdre l'équilibre ou toucher les murs, garder en vue les cafards qui courent également au sol et respirer un grand coup avant d'utiliser l'eau bien froide ! "

" Dimanche matin, 6h30. L'heure de partir pour la messe. Pamela et moi, encore à peine réveillées, prenons le chemin de l'église dans les sentiers sablonneux et l'herbe encore mouillée de rosée, à travers les huttes. Ce matin, toute timidité entre nous à disparu, que c'est chouette. 
Le lever du soleil est superbe, le ciel bleu est moucheté de légers nuages, il fait légèrement frais mais c'est fort agréable... c'est calme... tout est gracieux et paisible. Et le comble de ce tableau ce sont les petits lapins blancs qui broutent dans les champs et tout près de nous sur le bord des chemins, sans même s'enfuir à notre passage.
Le soleil est en train de se lever derrière l'église qui se détache superbement en contre-jour. Nous arrivons très légèrement en retard mais nous nous plaçons discrètement. Heureuse je suis d'assister à ma première messe ougandaise. La messe est catholique et en anglais, ce qui fait que je peux la suivre parfaitement. C'est une très belle messe : joyeuse surtout et recueillie. Intensité touchante, qui t'emmène loin, peu importe ta religion.

Tout le monde chante vraiment, les femmes rajoutent à certains moments leurs cris aigus, les musiciens amplifient cette participation et tous les jeunes (ils sont très nombreux) tapent en rythme dans leurs mains en plus de leurs chants entraînants. L'église est pleine à craquer et ces chants font vraiment voyager, c'est incroyable d'émotion et de joie. "

" Émotion au moment de dire au revoir à Margaret et sa sœur, prof retraitée. Mes yeux brillaient de larmes, heureusement qu'il faisait sombre dans la hutte. J'ai la gorge nouée. Très touchée par ses dernières paroles, ses sourires, son accueil si généreux et son humour. "


" Nous faisons une grande partie de la route du retour sous un orage monstrueux et sans pluie au début (après il a aussi plu des cordes), et il fait déjà très sombre à 17h. 
À un moment, le bus entier a sursauté, la foudre n'est vraiment pas tombée loin, dans un bruit assourdissant. Gloups. Le bus surpeuplé a tremblé, tout le monde a eu peur et réagit, pour se rassurer, en parlant un peu plus fort, par dessus la musique que l'on a également augmentée. Il y a de l'électricité dans l'air et une espèce d'ambiance moite et tendue, c'est assez surréaliste.
La brousse tout entière, à des kilomètres à la ronde, semble prise dans cet énorme orage. De temps en temps, on aperçoit dans la brousse de faibles lueurs orangées qui filtrent de quelques huttes invisibles, dans les ténèbres zébrés d'éclairs. Des refuges où des humains se calfeutrent, vivent, pensent, sous cette tempête, au milieu de cette nature luxuriante qui paraît alors hostile et inhospitalière.

On finit par atteindre Gulu sans même s'embourber, je suis bien contente.
J'ai l'impression de rentrer à la maison. Je descends du bus sûre de moi et regagne mon petit hôtel comme si j'avais fait ce trajet toute ma vie, même de nuit. Back dans ma petite chambre H1."


Ça me manque tant ... L'appel de la route me tortille les tripes et le cerveau régulièrement, certains soirs plus fort que d'autres.
Viva Uganda !



mardi 16 novembre 2010